
Le mardi 11 octobre dernier, les autorités américaines ont pris la décision de surseoir temporairement sur la politique de déportation massive des Haïtiens en situation irrégulière suite au passage du cyclone Matthieu en Haïti. Cependant, il ne s’agit pas d’un changement de politique, les déportations peuvent reprendre à l’avenir. “La lutte continue”, a pour sa part annoncé Marleine Bastien de l’organisation Fanm Ayisyen nan Miyami (FANM).
Les organisations de la Diaspora défendant les droits des réfugiés avaient d’abord crié victoire, mais elle se sont bien vite rendus compte qu’il ne s’agissait pas d’un changement de politique permanent de l’administration américaine. Les réjouissances auront donc été de courte durée. La décision des autorités américaines de surseoir sur la politique de déportation des Haïtiens illégaux n’est que provisoire et les États-Unis ont l’intention de revenir sur leur politique d’expulsion une fois que la crise humanitaire est contenue en Haïti, a indiqué Jeh Johnson, l’actuel secrétaire américain du Département de la Sécurité Intérieure (Department of Homeland Security ou DHS).
Le 22 septembre écoulé, Jeh Johnson avait annoncé que le Département de la Sécurité Intérieure américain allait reprendre les déportations régulières des réfugiés illégaux vers Haïti, des déportations qui avaient temporairement cessé après le tremblement de terre catastrophique en Haïti en janvier 2010. Cette nouvelle décision allait toucher à la fois les compatriotes qui se trouvaient déjà en situation irrégulière aux USA ainsi que ceux qui voulaient entrer illégalement aux Etat-s-Unis en passant par les pays de l’Amérique latine et centrale. Parmi ces derniers, certains ont été incarcérés dans les prisons américaines en attendant d’être expulsés.
L’annonce de la reprise des expulsions des Haïtiens en situation irrégulière avait provoqué une levée de bouclier de la part des organisations haïtiano-américaines de défense des droits des réfugiés. Celles-ci avaient notamment organisé une conférence de presse le lundi 10 octobre dernier au nouveau local de l’organisation Fanm Ayisyen nan Miyami (100 NE 84 St, Miami, FL) pour dénoncer cette décision des autorités américaines.
Au cours de cette conférence, les organisateurs ont protesté contre la reprise des déportations et ont présenté aux micros et caméras des divers médias floridiens présents des familles frappées par la nouvelle mesure. Avec des larmes aux yeux, plus d’un ont demandé au président Obama de surseoir sur sa décision d’expulser les Haïtiens en situation irrégulière. D’autres ont qualifié la nouvelle politique de déportation d’abomination considérant les ravages laissés par l’ouragan Matthieu en Haïti.
Au lendemain de la conférence de presse, les autorités américaines ont annoncé l’arrêt momentané de la politique de déportation. Toutefois, puisqu’il s’agit d’une suspension temporaire, cette décision ne satisfait que temporairement les organisations haïtiano-américaines qui demandaient un changement total de la politique d’expulsion. Ces organisations ont vite fait de se remobiliser pour continuer la bataille. Le vendredi 14 octobre écoulé, plusieurs organisations de défense des droits des réfugiés ont organisé une manifestation à Miami pour protester contre le maintien de la politique de déportation.
« La lutte ne fait que commencer », a déclaré l’infatigable Marleine Bastien, de l’organisation FANM. « Ici, on ne nous fait pas de cadeau, tout de ce que nous avions obtenu jusqu’ici comme immigré, c’est à la suite de longues luttes, c’est sur le béton que nous l’obtenons », a-t-elle indiqué. « Nous allons continuer à nous battre partout, que ce soit dans les rues, devant les tribunaux ou sur les réseaux sociaux », a-t-elle ajouté.
Diverses organisations sont descendues dans les rues vendredi dernier pour protester. Elles se sont rassemblées devant les locaux des Services d’Immigration des Etats-Unis (8801 NW 7th Ave, Miami, FL 33150). Ces organisations ont formulé quatre demandes à l’endroit des autorités américaines : 1) Changer la politique d’expulsion des réfugiés haïtiens ; 2) Libérer les réfugiés haïtiens qui sont actuellement détenus par les Services d’immigration des États-Unis (USCIS) à San Diego, les accueillir comme les réfugiés qu’ils sont comme c’est le cas pour les Cubains ; 3) Elargir le Statut de Protection Temporaire(TPS) pour y inclure les nouveaux réfugiés et ceux arrivés aux USA après le 12 janvier 2010; 4) Ouvrir le Programme de réunification des famille haïtiennes (Haitian Family Reunification Program) pour permettre à des personnes vivant en Haïti de rejoindre leur famille aux USA.
Parmi les organisations protestataires, nous pouvons citer : FANM Ayisyen nan Miyami, SEIU Florida, SEIU 1199, AFL-CIO, New Florida Majority, Florida Immigrant Coalition, Miami Workers Center, Power U Center for Social Change, Haitian-American Grassroots Coalition, American Jewish Committee, American Friends Service Committee, Unite Here, American for Immigrants Justice, Haitian American Community Development Coalition, Neighbor and Neighbor Association (NANA) Circle of Brotherhood, Grand Black, Inc., American Friends Service Committee, Americans for Immigrants Justice, Institute for Justice & Democracy in Haiti and Catholic Charities Legal Services etc.
Jonel Juste
*Cet article a été aussi publié dans Le National.